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À Florennes, rencontre entre demandeurs d’asile, travailleurs sociaux et riverains du centre d’accueil

Ce 22 juin, dans la salle Saint-Pierre du foyer culturel de Florennes, travailleurs sociaux, demandeurs d’asile et riverains du centre d’accueil Fedasil de Florennes1 onttémoigné de leur vécu devant des acteurs sociaux de la région et une partie de la population dans un débat public intitulé : « Despréjugés… à la réalité du vécu de la personne en exil ».

02-07-2006 Alter Échos n° 211

Ce 22 juin, dans la salle Saint-Pierre du foyer culturel de Florennes, travailleurs sociaux, demandeurs d’asile et riverains du centre d’accueil Fedasil de Florennes1 onttémoigné de leur vécu devant des acteurs sociaux de la région et une partie de la population dans un débat public intitulé : « Despréjugés… à la réalité du vécu de la personne en exil ».

Cette soirée était le résultat d’un partenariat entre l’Agence fédérale pour l’accueil des demandeurs d’asile (Fedasil), l’AMOJeunes 20002, la Maison de la Laïcité et l’Irfam (Institut de Recherche, Formation, Action sur les Migrations) et s’insérait dans le projet deprévention générale « Intercultur’Réalité » entamé en mars 2005 avec la réalisation d’un Livre blanc.

Catherine Minne, assistante sociale à l’AMO Jeunes 2000 a parlé de la « difficulté d’être jeune, encore multipliée pour un jeuneréfugié ». Elle a parlé de « la promiscuité que ces jeunes vivent, en étant confinés à trois ou quatre dans une ou deux pièces, durefus par les écoles des jeunes demandeurs d’asile, de l’intolérance qu’ils subissent, de leurs problèmes d’argent et du travail d’écoute quel’AMO procure à ces jeunes pendant et après leur séjour ».

Ousman, âgé de 21 ans aujourd’hui et arrivé en Belgique en 2002 a tenu à témoigner : « Je me suis retrouvé après une attente de huitheures à l’Office des Étrangers à Bruxelles à prendre le bus pour Florennes. J’ai dû subir un test pour déterminer mon âge et j’aiété taxé de majeur alors que je n’avais que 17 ans. J’aurais voulu suivre les cours d’hôtellerie mais fus contraint de suivre une filière bois.Tous les étrangers du centre suivaient la même filière ». Ousman a parlé de la « difficulté de se côtoyer entre tant de nationalitésdifférentes. Entre nous aussi, il y a du racisme ». Il a préféré quitter le centre pour vivre avec la maman (belge) de son fils, qui l’héberge.

Non reconnaissance de leur histoire

Une assistante sociale de Fedasil a raconté l’arrivée des demandeurs d’asile au centre « à pied avec leurs bagages et leur histoire. Que 350 personnes et 40nationalités différentes se retrouvent au centre, qu’ils n’ont pas le temps de se poser qu’ils doivent déjà subir une procédure bureaucratique quiles stresse. Sans nouvelles de leurs proches, sans intimité, sans pouvoir cuisiner, en situation de dépendance, et en subissant de surcroît une non-reconnaissance de leur histoire».

Adolf, Tutsi originaire du Congo est en Belgique depuis 2002 et s’investit dans le mouvement des sans-papiers : « Qui doit-on intégrer ? Le centre Fedasil ou lesréfugiés ? Nous quittons nos rituels pour venir en Belgique et vivre dans des chambres de huit. Je n’ai jamais rêvé de vivre dans une chambre de huit. Pendant combien detemps devons-nous vivre ainsi ? Et nous nous retrouvons à devoir quitter le pays après cinq ans. Nous vivons une vie précaire au centre à attendre dansl’incertitude. J’ai une petite fille de 9 ans que je ne vois plus. Ce n’est pas une vie dans un pays démocratique. Nous demandons à la population de comprendre notreproblématique ».

La souffrance de se sentir inutile

Jamila Moussaoui, psychothérapeute, a parlé de son travail d’écoute des personnes qui arrivent chez elle avec leurs plaintes psychosomatiques, leurs angoisses, leurpsychose parfois. « Ils viennent avec du malheur plein leurs valises et ils se retrouvent dans l’impossibilité de se projeter, de s’éduquer, de se former et de formerleurs enfants. Ils se retrouvent dans un contexte de travail pathogène…. Nous jetons les personnes dans un no man’s land…. On refuse l’immigration mais ontolère la clandestinité… »

Nelly, d’origine bulgare, est arrivée dans notre pays en tant que demandeuse d’asile. Après avoir vécu pendant 8 ans en Flandre, elle travaille depuis 2002 en tantqu’éducatrice dans l’aile de Florennes réservée à l’accueil des Mena : « J’ai été obligée de trouver du bonheurailleurs. J’ai tout laissé, ma personnalité, ma culture, mes croyances, mon langage, mon identité, tout. Et je ne suis plus personne, je ne suis plus qu’unétranger, un dossier, un numéro, un voleur, un délinquant. La plus grande souffrance est de se sentir inutile. Dans chaque personne, il y a du soleil et il faut donner lapossibilité au soleil de briller. »

Une riveraine de Florennes « désireuse de connaître les demandeurs d’asile qui passent et repassent dans sa rue » s’est voulue la porte-parole des autres riverains :« Le climat social actuel est peu propice. Le nombre de réfugiés fait peur et provoque un blocage. Les réfugiés qui arrivent chez nous nous remettent en question. Neles abîmons pas trop… Nous devrions diriger le pays en bons pères de famille. »

1. Centre d’accueil – Florennes, rue Henry de Rohan Chabot 120 à 5620 Florennes – tél. : 071 68 11 00 -fax: 071 68 11 05 – info.florennes@fedasil.be
2. AMO Jeunes 2000, rue Saint-Pierre, 17 à 5620 Florennes – tél. : 071 68 64 53 – GSM : 0497 40 18 85 – fax : 071 61 57 68 – amojeunes2000@skynet.be

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