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Regard critique · Justice sociale

Migrations

Pays-Bas : le « tsunami musulman » n’aura pas lieu !

Les chiffres contredisent les prédictions des populistes néerlandais.

03-02-2012 Alter Échos n° 331

Les populistes néerlandais, Geert Wilders en tête, prédisent un « tsunami musulman » pour les Pays-Bas : une invasion de réfugiés conjuguée à une guerre démographique dont le but ultime est l’islamisation du pays des tulipes. Pourtant, les chiffres du Bureau central des statistiques décrivent une situation différente : une chute du nombre de demandeurs d’asile ET un effondrement de la natalité chez les « allochtones »…

Les populistes néerlandais sont pessimistes : normal, c’est l’essence même du populisme de décrire une situation alarmiste afin de s’ériger en sauveur du peuple contre la trahison des élites. Mais il y a un domaine dans lequel cette paranoïa très calculée déploie toute la puissance de son imaginaire : l’invasion migratoire !

Geert Wilders, qui fait rarement dans le détail, parle sans complexe d’un « tsunami musulman » !
Pourtant, les chiffres du Bureau central des statistiques montrent une réalité sensiblement différente : le nombre de demandeurs d’asile diminue. Quant à la fécondité explosive des immigrés, elle s’avère inférieure à celle des Néerlandaises.

Une baisse de 13 % des demandeurs d’asile en un an

Contrairement aux prédictions alarmistes de Geert Wilders – le nombre de demandeurs d’asile n’a pas dramatiquement explosé. Au contraire : il ne cesse de décroître depuis 2009. Entre 2010 et 2011, le nombre de demandeurs d’asile est passé de 13 340 à 11 590 : soit une baisse d’environ 13 %. Cette baisse est due essentiellement à la diminution de demandeurs en provenance de Somalie, qui représentaient 30 % du total en 2010 et qui atteint à peine 10 % l’année suivante1.

Les démographes de l’Institut démographique interdisciplinaire néerlandais se sont penchés sur l’évolution des migrations aux Pays-Bas depuis l’année 2000.

Une chute de 42 % des regroupements familiaux

Selon eux, l’immigration non occidentale a presque baissé de moitié entre 2001 et 2005, passant de 36 000 à 67 000 personnes. L’immigration par regroupement familial a baissé de 42 % entre 2004 et 2007 : de 27 000 à 15 000 personnes2. Et puis la tendance s’est de nouveau inversée entre 2007 et 2009, avec un pic de 56 000 immigrés non occidentaux en 2009.

La politique migratoire n’est pas seule en cause : les crises – guerres, famines – augmentent le nombre de demandes. La conjoncture économique locale joue également un rôle : lorsque le taux de chômage néerlandais croît, l’immigration baisse et inversement.
Une autre tendance lourde se dessine : alors que les migrants d’origine non occidentale formaient la moitié des effectifs autour de l’an 2000, ils ne comptent plus aujourd’hui que pour un tiers de la population immigrée. Les demandes des populistes sont donc déjà réalisées par des facteurs extérieurs à toute politique migratoire.

Un effondrement de la natalité des migrants

Qu’en est-il de la bombe à retardement démographique tant redoutée des xénophobes ? Elle ressemble plutôt à un pétard mouillé, si l’on en juge par les chiffres plutôt que par les angoisses collectives.

Les Pays-Bas ont connu une baisse démographique impressionnante : alors qu’en 1950, le nombre moyen d’enfants par famille était de 3,097, il est tombé à 1,468 en 1983. Soit bien en dessous du taux de renouvellement de la population qui est de 2,1 %.

L’augmentation du taux de fécondité postérieure à 1983 est due essentiellement à l’immigration. Ce taux se situe aujourd’hui à 1,8 %, toujours insuffisant pour maintenir la population à son niveau actuel.

Mais si l’on examine les chiffres du bureau de statistiques, on s’aperçoit que le taux de fécondité des migrants est lui aussi en chute libre : seules les familles marocaines ont encore en moyenne 2,5 enfants. Et ce chiffre baisse régulièrement depuis 1996, où il était encore de 3,25 enfants par famille.   On peut donc prédire sans grand risque qu’il plongera sous la barre fatidique des 2,1 dans quelques années.

Plus étonnant encore : le taux de fécondité des femmes immigrantes, toutes communautés confondues, est aujourd’hui plus faible que celui des Néerlandaises : 1,772 enfant par famille contre 1,816. Ce qui annonce une nouvelle diminution de la population.

Vous avez dit « tsunami » ?

1. Bureau Central des Statistiques, Azielverzoekers naar land van nationaliteït, Gewijzigd op 17 januari 2012.
2. http://www.nidi.knaw.nl/Content/NIDI/demos/2011/demos-27-02.pdf

Marco Bertolini

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