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La pauvreté par la racine

Les Fédérations des centres de service social se sont penchées sur les problématiques rencontrées par les travailleurs du secteur et appellent à despolitiques plus volontaristes, agissant contre les causes de la pauvreté, et non contre ses seuls effets.

14-02-2010 Alter Échos n° 289

Les Fédérations des centres de service social se sont penchées sur les problématiques rencontrées par les travailleurs du secteur et appellent à despolitiques plus volontaristes, agissant contre les causes de la pauvreté, et non contre ses seuls effets.

La Fédération des centres de service social (FCSS) et la Fédération des centres de service social bicommunautaire (FCSSB)1 se sont penchées sur lesproblématiques rencontrées par les travailleurs du secteur à Bruxelles et en Wallonie dans le cadre d’une recherche action2 dont les résultats viennentd’être publiés. À la lecture de cette étude complète, on peut se demander si les politiques de lutte contre la pauvreté ne se limitent pas à coller desrustines, là où il faudrait des mesures de fond.

Comme le souligne Jordane de Changy, coordinatrice et rédactrice de la recherche, « cela se constate en particulier si l’on se penche sur la question de l’accès au revenu», une des six thématiques abordées par le rapport. Les autres chapitres, quant à eux, sont consacrés au logement, à l’énergie, à lasanté, à la culture et aux sans-papiers.

Trop souvent, les allocations sociales, en particulier dans le cas des non-isolés, ne permettent plus de couvrir les besoins de base. Même constat pour le salaire minimum. Bienmalgré eux, les travailleurs sociaux se retrouvent ainsi à faire de « l’éco-éducation », dénonce le rapport. « La vocation destravailleurs sociaux n’est pas d’aider les personnes à « faire avec » trop peu, mais de les aider à vivre dans la dignité », peut-on y lire en substance. De soncôté, l’État déploie une panoplie de mesures sélectives : tarifs sociaux avantageux pour les télécoms, le gaz, allocations familialesmajorées… Ce faisant, il place les personnes dans une situation de demandeur. Une prime par ici, un forfait par là, il faut tendre la main pour obtenir de quoi joindre les deux bouts.« On est dans le palliatif, déplore Jordane de Changy. On dépense beaucoup d’argent pour pallier des manques, quand il serait préférable d’augmenter les revenusen général. »

Pour illustrer son propos, l’auteure prend l’exemple des compteurs à budget qui, basés sur le principe des cartes téléphoniques prépayées, sontcensés permettre aux consommateurs de gérer leur consommation d’électricité. « C’est un système coûteux pour la Région, coût quel’on pourrait investir dans du double vitrage. »

La richesse, c’est l’info

La pauvreté ne se limite pas à une question de sous. Dans une société qui valorise la connaissance, l’accès à l’information constitue un enjeu clé.« Tant que l’on n’a pas accès à l’information, on n’a pas accès aux droits sociaux », déplore Jordane de Changy. Primes, plans, forfaits… difficilepour les utilisateurs de s’y retrouver quand même les travailleurs sociaux ont parfois du mal à y voir clair. « Mises à part les questions d’accès aux droits, ilne faut pas oublier que l’information, c’est aussi maîtriser la langue, accéder à la culture, au travail… trouver sa place dans la société », rappellel’auteure.

Au-delà de la problématique de l’information, sur laquelle l’étude insiste longuement, d’autres pistes sont évoquées en matière de luttecontre la pauvreté. Investir dans un enseignement de qualité, revaloriser l’aide et la sécurité sociale, réguler le marché de l’immobilier, figurent en hautdes priorités. Des actions très concrètes sont proposées : organiser des classes-passerelles pour les non-francophones, utiliser les outils fiscaux pour inciter lespropriétaires à appliquer des loyers raisonnables, etc.
Autant de mesures qui méritent très certainement d’être étudiées. « Mais qui ne remettent pas en cause le système », notetoutefois Jordane de Changy, relayant les préoccupations des travailleurs sociaux qui ont participé à la recherche. « Le système d’économielibéral n’est presque plus jamais remis en question. On parle de régulation tout au plus. Il y a un manque de réflexion sur ces sujets et c’est le travailleur social qui enpâtit, quand on vient frapper à sa porte avec des problèmes ingérables. Lourde responsabilité », conclut-elle.

1. Fédération des centres de service social :
– adresse : rue Gheude, 49 à 1070 Bruxelles
– tél. : 02 223 37 74
– site : www.fcss.be
2. Accès aux droits sociaux fondamentaux. Regards des travailleurs sociaux de terrain (issus des CAP, des CASG et des CSSW). FCSSB-FBCMW, octobre 2009. Téléchargeable sur: www.fcss.be

Sandrine Warsztacki

Sandrine Warsztacki

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