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Emploi/formation

Formation professionnelle à Bruxelles : les jeunes manquent à l’appel

La Commission consultative Formation-Emploi-Enseignement (CCFEE)1 vient de publier son nouvel état des lieux, accompagné d’un avis concernant la formation professionnelleen Région de Bruxelles-Capitale. Les grandes tendances : une hausse du nombre de personnes formées et parmi celles-ci, une diminution paradoxale de la tranche d’âge des 18-25ans.

25-04-2008 Alter Échos n° 250
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La Commission consultative Formation-Emploi-Enseignement (CCFEE)1 vient de publier son nouvel état des lieux, accompagné d’un avis concernant la formation professionnelle en Région de Bruxelles-Capitale. Les grandes tendances : une hausse du nombre de personnes formées et parmi celles-ci, une diminution paradoxale de la tranche d’âge des 18-25ans.

Près de huit ans après la publication de son dernier état des lieux concernant la formation professionnelle à Bruxelles, la CCFEE a pris l’initiative de réaliser un nouvel inventaire concernant les dispositifs en matière de formation professionnelle à Bruxelles. Centrée sur les formations reconnues par les pouvoirs publics et organisées par les opérateurs subventionnés ou publics [NDLR : enseignement de promotion sociale, Bruxelles Formation, Espace Formation PME (EFPME), les organismes d’insertion socioprofessionnelle (OISP) et les centres d’éducation et de formation en alternance (CEFA)], l’étude se présente comme une photographie de la situation en 2005-2006. Une volonté d’exhaustivité qui, si elle s’est vue quelque peu contrecarrée par le manque de données complètes collectées à propos de l’enseignement de promotion sociale (pourtant considéré comme l’opérateur formant le plus grand nombre de personnes), n’en permet pas moins à la CCFEE de dégager de grandes tendances et d’émettre une série de recommandations par le biais d’un avis (l’avis n° 75) qu’elle a adopté le 18 mars.

Un public plus âgé et en augmentation

Au rayon des grandes tendances observées par la Commission consultative, on trouve ainsi le constat d’une hausse globale, mais contrastée, du volume des personnes formées puisque la CCFEE note que les chiffres livrés varient, quelquefois fortement, en fonction du statut, du niveau de diplôme à l’entrée, de l’origine, du genre ou encore de l’âge de celles-ci. Rien que pour ce dernier critère, alors que les personnes ayant plus de 25 ans, voire plus de 45 ans, sont en augmentation presque partout, la tranche des 18-25 ans présente, quant à elle, une tendance à la baisse qui pose question.

Donat Carlier, secrétaire-coordinateur de la CCFFE déclare à ce propos « (…) ne pas savoir où sont passés les 18-25 ans. On pourrait bien sûr supposer que ceux-ci auraient tendance à prolonger leurs études plus longuement que par le passé, mais je ne crois pas trop à cette hypothèse puisque les dernières tendances montrent clairement que le nombre de 18-25 ans sans diplôme et sans travail est en augmentation… Il y a donc quelque chose qui ne colle pas. »

Du côté du statut des personnes, la Commission consultative constate une augmentation marquée du nombre, et également de la proportion, des demandeurs d’emploi parmi les participants aux formations professionnelles. Des participants qui seraient également de plus en plus majoritairement de sexe féminin et qui se focaliseraient sur des domaines de formation comme les langues, le « commerce et administration » ou l’informatique, confirmant pour ce dernier point les tendances déjà observées lors du dernier état des lieux datant de 1999-2000. Enfin, la CCFEE observe une augmentation du nombre de primo-arrivants ainsi que des personnes issues de pays situés en dehors de l’Union européenne.

Quelles recommandations ?

Partant de ces constats, la Commission consultative Formation-Emploi-Enseignement formule une série de recommandations à l’adresse des pouvoirs publics bruxellois. Face à la diversité des publics évoqués, il convient, selon elle, de valoriser une autre diversité : celle des opérateurs de formation professionnelle, afin que ceux-ci puissent couvrir l’ensemble des réalités bruxelloises.

L’augmentation nécessaire du volume des formations est également mise en exergue, de même que l’urgence qu’il semble y avoir à rencontrer la question de la diminution dela tranche des 18-25 ans parmi les différents publics participant aux formations professionnelles. Si la CCFEE ne donne pas de réponse à cette dernière problématique, elle recommande cependant de donner la priorité à la qualification des jeunes, jeunes dont le « taux d’abandon scolaire précoce », en diminution de 1999 à 2004, est reparti à la hausse entre 2004 et 2006 pour passer de 18,1 % à 19,3 %. Un chiffre entièrement dû, selon la Commission consultative, aux jeunes hommes, ce qui a contrario ne fait que mettre un peu plus en lumière la bonne tenue du public féminin au niveau de l’enseignement et des formations professionnelles. Selon la CCFEE, les jeunes femmes sont désormais mieux formées que les jeunes hommes. Une meilleure formation qui n’est cependant pas toujours récompensée au niveau de l’accès à l’emploi puisque les efforts de formation, tant initiale que continuée, des femmes semblent moins se traduire, comparativement aux hommes, en positions correspondantes sur le marché du travail… « Si l’on peut affirmer que globalement, les femmes sont moins discriminées à Bruxelles qu’en Flandre ou en Wallonie renchérit Donat Carlier, ce n’est pas le cas pour les femmes assez jeunes qui, elles, cumulent deux ‘handicaps’. Elles sont non seulement jeunes mais aussi souvent d’origine étrangère. Elles sont donc quelquefois victimes d’une double discrimination. »

Afin de remédier à cette problématique, la Commission consultative suggère que les politiques et actions en la matière soient amplifiées et ce, notamment par la mise en œuvre des recommandations en matière de lutte contre les inégalités de genre, formulées par le Conseil économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale. Enfin, et c’est en partie lié, elle recommande aussi de mieux répondre aux besoins des primo-arrivants. Au-delà de la nécessité de rencontrer les besoins de ce public en formation « français langue étrangère », la CCFEE note que la production de données en Région de Bruxelles-Capitale devrait être en mesure de mieux intégrer la réalité sociodémographique de celle-ci afin de remédier aux difficultés d’insertion (et particulièrement la discrimination à l’embauche à niveau de formation égal) des populations d’origine étrangère.

Pour conclure, outre sur la nécessaire évolution de l’offre de formation, la Commission consultative insiste également sur la nécessité de développer plus encore l’offre complémentaire à la qualification professionnelle (maîtrise des langues, alphabétisation,…) et les synergies entre les opérateurs de formation,l’enseignement et les partenaires sociaux.

1. Commission consultative Formation-Emploi-Enseignement (CCFEE) :
– adresse :, rue de Stalle, 67 à 1180 Bruxelles
– tél. : 02 371 74 32
– fax : 02 371 74 33
– courriel : secretariat@ccfee.be
– site : www.ccfee.be

 

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste (emploi et formation)

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