Le téléphone de Chris sonne. Au bout du fil, c’est le Samusocial. L’appel concerne Ennio, 70 ans, installé depuis trois ans dans un parking promis à la fermeture. Malgré des revenus, des papiers en règle et des propositions répétées de relogement, Ennio refuse tout. «On a tout essayé, il ne veut rien. Il veut juste un bateau. Mais ce n’est pas possible», confie Chris. Les policiers, comme les travailleurs sociaux, ont tenté de construire un réseau autour de lui. Rien n’y fait. «Même sa travailleuse sociale de confiance a fini par lâcher prise.» À mesure que la date de fermeture approche, l’inquiétude grandit. Faut-il forcer la main à Ennio? «Parfois, la contrainte provoque un déclic, parfois non. Pour Ennio, la porte reste ouverte, mais l’issue est incertaine», admet Chris.
La voiture s’arrête, à proximité de Notre-Dame de la Chapelle, où deux tentes sont installées. Chris tombe sur une figure bien connue des maraudes. C’est Saxo, un chien. «Salut Chris!», lance son maître qui se réveille. Les deux hommes discutent.
– «Tu es revenu de France? Tout va bien?», s’inquiète l’inspecteur.
– «Oui, je repars dans la semaine. Dimanche au plus tard.»
– «Ça s’arrange sur Paris?», lui demande alors Pascal.
– «Pour le moment, je vais à droite, à gauche.»
Entre deux échanges sur les allers-retours entre Paris et Bruxelles, l’homme raconte ses galères, sa débrouille, Saxo, lui, en profite pour s’installer dans un fauteuil. Il est tellement à son aise que Chris en profite pour prendre une photo de l’animal. «Il est content de vous voir», constate son maître. «On pense souvent à lui, tu sais», répond Chris. L’an dernier, l’animal a failli succomber à une blessure grave, la team s’est alors cotisée pour offrir des soins au chien.
Garder l’équilibre entre le maintien de l’ordre et l’accompagnement social, c’est le fil sur lequel marchent les membres de la Team Herscham, comme Chris et Pascal. Chaque matin, le programme de la Team varie en fonction des demandes et des besoins du jour: interventions signalées par des citoyens, partenaires sociaux, agents de quartier ou encore la commune. «Il y a toujours quelque chose à faire!», explique Chris. L’équipe assure également le suivi des personnes rencontrées, tissant ainsi des liens de confiance avec elles.
Garder l’équilibre entre le maintien de l’ordre et l’accompagnement social, c’est le fil sur lequel marchent les membres de la Team Herscham, comme Chris et Pascal. Chaque matin, le programme de la Team varie en fonction des demandes et des besoins du jour: interventions signalées par des citoyens, partenaires sociaux, agents de quartier ou encore la commune.
De retour en voiture, l’équipe se dirige vers le parking où vit Ennio. À l’arrivée, une camionnette du Samu social est déjà là. Aujourd’hui, c’est l’équipe du Samu qui va tenir les pourparlers avec le vieil homme. «Mais il y a de fortes chances qu’on bloque, tu connais Ennio, Chris!», admet le travailleur social du Samu.
La patrouille se poursuit, en direction du quartier maritime. À la sortie d’une bouche de métro, près d’une plaine de jeux, la Team rencontre Saïd. Depuis sept ans, il vit en rue, isolé, sans suivi social, sans contact avec sa famille. Arrivé du Maroc il y a dix ans, il a tout perdu après la mort de sa mère. Chris et Pascal engagent le dialogue, proposent un accompagnement, expliquent les démarches pour sortir de la rue. Saïd décline, préférant «faire lui-même». La Team respecte ce choix, tout en soulignant la difficulté de «continuer comme ça». «Des Saïd, on en a toutes les semaines», résume Pascal. Ces rencontres illustrent la philosophie de l’équipe: être présents, écouter, proposer, sans jamais forcer.
L’équipe a reçu un autre signalement. Un homme s’est installé sous un pont. Quand l’équipe arrive sur place, l’homme dort. Cela fait un an qu’il est arrivé en Belgique. Il a vécu de petits boulots ici et là, sans jamais entamer sa demande d’asile. «Vous espérez quoi?», lui demande Chris. «Aller en Espagne», explique-t-il. «Là aussi, vous devrez faire une demande d’asile. Mais rester comme ça, ce n’est pas une vie. Vous allez tomber malade ici.» L’équipe l’informe du passage imminent du service de nettoyage et l’invite à récupérer ses affaires. Ils proposent leur aide pour entamer des démarches, tout en respectant son projet de départ. «Ce n’est pas le but de vous faire perdre vos affaires», insiste Chris.