Energie : la précarité à tous les étages

Deuxième étage
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Être accompagné

Textes : Pierre Jassogne - Capsules sonores : Marie-Eve Merckx - Illustrations : Maud Romera

La précarité énergétique est un cercle vicieux : moins on a de moyens, moins on profite des programmes d’utilisation rationnelle de l’énergie et plus les besoins en énergie sont élevés. Or, dès qu’un ménage consacre plus de 10% de ses revenus aux dépenses d’énergie dans son logement, il peut être considéré en état de précarité énergétique. Aux trois causes classiques de la précarité énergétique doit s’ajouter celle du "non-recours" aux aides ou aux droits, même si des mécanismes des "primes logement et énergie" se sont succédés ces dernières années offrant différents incitants financiers (primes énergie, primes à la rénovation, prêts à taux réduits, etc.) visant à améliorer la qualité du logement et de ses équipements.

Ainsi, à Bruxelles, le budget des primes atteignait en 2022 35 millions d’euros. Au total, le budget de la stratégie de rénovation des logements, bâtiments publics et bureaux passera à 110 millions en 2023. Et les autorités sont bien conscientes de la nécessité de prévoir un accompagnement des particuliers à travers la guidance assurée par des acteurs comme Homegrade, le Réseau habitat, des guichets communaux ou des travailleurs sociaux. Un accompagnement qui a été principalement mobilisé par des propriétaires occupants ou des gestionnaires de logements publics. Or, on l’a dit : 62% des Bruxellois sont locataires.

Il est donc particulièrement difficile de convaincre un propriétaire d’améliorer le bien qu’il met en location tout en gardant un loyer abordable.

"C’est un travail compliqué parce qu’il faut convaincre des propriétaires privés aux profils très différents d’engager des rénovations qui seront en grande partie financées à leurs frais, confirme Caroline Davreux, cheffe du département Habiter + au sein de l’asbl bruxelloise Habitat et Rénovation qui accompagne les propriétaires et les locataires. Mais aussi parce que certains locataires précaires vivent dans de mauvais logements et ne font pas les demandes de rénovation par peur de représailles".

"Nous classons les propriétaires dans deux grandes classes: les propriétaires occupants (ceux qui vivent dans leur logement) et les propriétaires bailleurs (ceux qui louent leur logement)", explique Barbara Charles de la Brousse, coordinatrice de l’asbl Sohonet, une plateforme qui soutient et stimule la création de logements à finalité sociale à Bruxelles. "Mais, au sein même de ces deux catégories, il existe une multitude de profils avec des moyens financiers, des connaissances, des envies et des intérêts différents. C’est cela qui rend la tâche très difficile".

Elise Kersters, conseillère en rénovation chez Habitat et Rénovation, ajoute: "Il serait facile de mettre toute la faute sur les propriétaires et de dire que la rénovation de leur bâtiment n’est que de leur responsabilité. Pour certains, les gros bailleurs, cela peut sembler légitime. Mais, dans la grande majorité, les propriétaires possèdent un ou deux biens. Pour eux les choses sont bien plus complexes."

Car les coûts d’investissements sont importants. Dans la plupart des études disponibles, le coût moyen estimé d’une rénovation profonde varie entre 47.055 et 100.000 euros et met environ 30 ans à être amorti. Alors, comment les inciter eux aussi à rénover? "Il faut renforcer les mécanismes d’accompagnement", répond Caroline Davreux.

Mais aussi parce que, à Bruxelles ou en Wallonie, l’accès aux avantages rénovations n’est pas si simple. "Les procédures pour l’accès aux primes sont longues et compliquées", ajoute encore Sandrine Meyer.

Intervention de Sandrine Couturier, directrice de l'asbl Convivence

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