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Regard critique · Justice sociale

Emploi/formation

Après le TTIP, le TISA pour privatiser les services publics ?

C’est l’accord commercial le plus secret jamais négocié. Réunis à Genève, 50 pays discutent depuis deux ans de l’ouverture du « marché des services » à la concurrence internationale. Éducation, santé, transports, télécommunications, services financiers… Tout est sur la table des négociations.

Libéralisation des services publics, « liberté » totale d’Internet et stockage illimité des données, non-régulation des services financiers, menaces sur les normes sociales et environnementales… Négocié en marge de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), le TISA (Trade In Services Agreement) pourrait déréguler presque tous les secteurs publics.

 

Les principales clauses de cet accord limitent drastiquement la capacité de régulation de l’État. Elles obligent un pays à traiter les fournisseurs de services étrangers comme les nationaux, qu’ils soient publics ou privés. « L’ACS prévoit de verrouiller la privatisation des services – même là où le secteur privé a échoué dans ses missions – empêchant ainsi les gouvernements de ramener les services de l’eau, de l’énergie, de la santé, de l’éducation et autres dans le giron public », affirme dans un communiqué Rosa Pavanelli, secrétaire générale de l’Internationale des services publics (ISP).

 

Selon cette organisation, qui fédère les syndicats du secteur et représente 20 millions de travailleurs, une « clause à effet de cliquet » viendrait ainsi figer toute future libéralisation d’un service donné. Concrètement, si une partie de l’assurance chômage était privatisée, ou la retraite était démantelée au profit de fonds de pension, il serait impossible de revenir en arrière. Autre problème : l’accord pourrait imposer aux autorités publiques une « obligation de neutralité économique » entre prestataires de services publics et privés, dénonce l’ISP. En clair, tout soutien financier apporté aux services publics devrait être ouvert au secteur privé, par effet de miroir.

 

« L’ACS s’inscrit dans cette nouvelle vague inquiétante d’accords commerciaux et d’investissement, reposant sur des pouvoirs juridiquement contraignants qui institutionnalisent les droits des investisseurs et interdisent toute intervention des États dans un large éventail de secteurs indirectement liés au commerce », décrit l’organisation internationale dans un rapport de vingt-huit pages. A la suite des révélations de WikiLeaks, divulguant l’annexe de l’accord concernant les services financiers, des ONG ont réclamé que les textes sur la table soient rendus publics. Mais à ce jour, seules la Suisse et la Norvège ont publié leur offre sur Internet. Les autres pays refusent.

 

L’idée d’un accord sur le commerce des services a été lancée par les États-Unis et proposée à un groupe de membres de l’OMC, appelé « Really Good Friends », après l’impasse des négociations du cycle de Doha. Depuis février 2012, ce groupe de 50 pays, dont ceux de l’Union européenne, se réunit de manière régulière à Genève sous la conduite conjointe des États-Unis et de l’Australie. En novembre, les participants avaient convenu qu’il était possible de procéder à un échange d’offres initiales. Le 7ème round a eu lieu fin juin à Genève.

Rafal Naczyk

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