Alter Échosr
Regard critique · Justice sociale

Emploi/formation

Esprit d'« Entreprise's », es-tu là ?

Le projet « Entreprise’s » était présenté il y a deux ans par Alter Échos comme le successeur plus ou moins illégitime de « Périclès ». Où en est-il aujourd’hui ?

13-09-2013 Alter Échos n° 365

Le projet « Entreprise’s » était présenté il y a deux ans par Alter Échos comme le successeur plus ou moins illégitime de « Périclès ». Où en est-il aujourd’hui ?

« Périclès revient-il d’entre les morts ? », titrait Alter Échos il y a deux ans (voir AE n° 318). Si le titre se voulait quelque peu ironique, la question que nous posions ne manquait pas de pertinence. Pour rappel, Périclès 1 (lancé en 2005) et Périclès 2 (2007) étaient nés d’un constat apparemment plein de bon sens : beaucoup d’entreprises semblaient confrontées à des problèmes de main d’œuvre pour des tâches ne nécessitant pas beaucoup de qualification mais ne représentant pas un volume suffisant pour créer des emplois supplémentaires en interne. Dans ce contexte, Périclès permettait aux agences conseil en économie sociale de porter des projets qui devaient développer un partenariat avec trois groupements d’entreprises et/ou grandes entreprises, regrouper la main d’œuvre et favoriser la création d’entreprises d’insertion destinées à engager le personnel nécessaire à la satisfaction des besoins évoqués plus haut. En 2007, Périclès s’élargissait même aux ETA (entreprises de travail adapté) et aux sociétés à finalité sociale.

Néanmoins, les résultats ne sont pas au rendez-vous, principalement en termes de création d’emploi (on parlait de créer 500 emplois) et en 2010, le couperet tombe : Périclès ne sera pas renouvelé, même si le cabinet de Jean-Claude Marcourt (PS), ministre wallon de l’Économie déclare à ce moment travailler à sa suite. Aux rayons des problèmes aux origines de ce semi-échec, la difficulté de trouver des porteurs de projets ou encore une certaine réticence des entreprises « classiques » à s’engager et à externaliser. Et ce, même si certains, comme Dimitri Coutiez, expert pour le cabinet, soulignent à ce moment que Périclès a permis des contacts positifs entre les agences conseil et les intercommunales, entre l’économie sociale et l’économie classique.

Périclès III ?

En 2011 cependant, le cabinet Marcourt annonce un nouveau projet visant à développer, d’après un communiqué de l’époque, « des projets structurants et construits sur des logiques de partenariat entre entreprises d’économie sociale, entreprises classiques, intercommunales de développement économique, centres de recherche… ». Le tout pour un budget de 600 000 euros. Présentés à l’ASE (Agence de stimulation économique) par les agences conseil en économie sociale, ces projets sont censés proposer de développer des activités dans le domaine du service aux entreprises, aux travailleurs ou encore proposer des projets industriels intégrés. Portés par une ou plusieurs agences conseil, ils doivent viser le développement d’au moins trois entreprises (dont une au moins d’économie sociale, sous forme de société coopérative, de société à finalité sociale, d’ETA, d’entreprise d’insertion ou d’Idess), prévoir un développement du volume d’emploi et se dérouler sur une période de 18 mois maximum.

On le voit, ce projet, que l’on sait depuis appelé « Entreprise’s », se rapproche de Périclès, du moins en ce qui concerne le volet de service aux entreprises. « Au début nous l’appelions Périclès III », nous dira d’ailleurs un travailleur issu d’une agence-conseil. Allait-il dès lors souffrir des mêmes maux ? Il faut d’abord savoir que deux appels à projets ont eu lieu dans le cadre d’« Entreprise’s », le premier en août 2012 – avec quatre projets retenus – et le deuxième fin avril 2013, qui a couronné trois projets. « Il restait de l’argent après le premier appel à projet (NDLR 200 000 euros), nous avons donc décidé d’en faire un deuxième », explique à ce propos Clarisse Ramaeckers, responsable de la communication pour l’Agence de stimulation économique, qui explique aussi que les montants attribués varient d’un projet à l’autre.

Les projets

Si les porteurs de projets couronnés par l’appel à projets d’avril 2013, comme Saw-b avec deux projets intitulés « Verts pellets » (qui vise à développer une filière de transformation de déchets verts pour les transformer en pellets, avec notamment une collecte par les intercommunales et une commercialisation vers les collectivités locales) et Modul’Éco (conception, fabrication et vente de modules écologiques évolutifs en bois, pour le logement) déclarent qu’il est encore un peu tôt pour se prononcer sur l’appel à projets, du côté de ceux ayant participé au premier, on a déjà un avis un peu plus avisé sur la question.

Un centre pour trois

L’idée du Centre d’économie sociale et d’innovation des métiers verts « nous est venue de certaines structures d’économie sociale que nous accompagnons », explique Fabrice Adam. Dans les faits, des structures comme Agricovert, Floreco et Bativert cherchaient un endroit pour abriter leurs activités, chose rendue compliquée par des loyers trop chers. L’idée d’un centre commun aux trois a donc émergé, mais l’animation du projet restait à mettre en place. C’est ce que prévoit le projet. « Ce qui est financé par l’ASE est l’animation de projet, le fait de mettre les acteurs autour de la table, le suivi de chantier, la synergie », détaille Fabrice Adam.

Une mutualisation de services est également prévue, comme les ressources humaines, la gestion du carnet de commandes ou encore la comptabilité. Des formations à destination des chefs d’entreprises et des animateurs des trois structures (plus « Crabe » et « Terre en vue ») y seront également dispensées par Crédal, Groupe One et Centre ID.

Ainsi, chez Crédal conseil, où un projet de création d’un centre d’économie sociale d’innovation et des métiers verts a été reçu en 2012, on note que si l’appel à projets est positif et doté d’un « budget conséquent », quelques interrogations subsistent. « L’appel à projets veut faire beaucoup de choses (voir encadré) à la fois, en peu de temps. 18 mois, c’est assez court si on veut notamment mettre en place des synergies industrielles », explique Fabrice Adam, coordinateur chez Crédal conseil, qui ajoute un autre point, important. « Il y a peu d’intérêt de la part des opérateurs d’animation économique pour le secteur de l’économie sociale alors qu’établir un partenariat avec au moins l’un d’entre eux est un des critères d’évaluation des projets. » Un constat qui se rapproche un peu de ce qui avait été dit à l’époque au sujet de Périclès.

Quelques critères d’évaluation des projets :

– le partenariat avec un ou plusieurs opérateurs d’animation économique agréés et coordonnés par l’ASE : centres d’entreprises et d’innovation, chambres de commerce, intercommunales ou le réseau UCM ;

– le développement d’emplois pour les travailleurs exclus du marché de l’emploi ;

– l’organisation de formations pour les travailleurs ;

– la transposabilité du projet dans d’autres zones de la Wallonie ou dans d’autres secteurs d’activités ;

– l’innovation du projet ;

– la prise en compte du développement durable.

Quelles suites ?

Pour la suite des opérations, on fait remarquer du côté de l’ASE que « des résultats concrets sont attendus de la part des projets » même s’il n’existe pas d’objectifs chiffrés. Un suivi au sein de l’Agence est actuellement mis en place pour chaque projet. Quant à l’éventualité d’un nouvel appel à projets, avec de nouveaux fonds, on fait remarquer au cabinet de Jean-Claude Marcourt que l’on se trouve encore dans le cours du deuxième appel à projets « et qu’il n’y a pas encore eu d’évaluation. Il n’y a donc pas encore de nouvelle ligne budgétaire ».

 

Julien Winkel

Julien Winkel

Journaliste (emploi et formation)

Pssstt, visiteur, visiteuse du site d'Alter Échos !

Nous sommes heureux que vous soyez si nombreux à nous suivre sur le web. Nous avons fait le choix de mettre en accès gratuit une grande partie de nos contenus, notamment ceux en lien avec le Covid-19, pour le partage, pour l'intérêt qu'ils représentent pour la collectivité, et pour répondre à notre mission d'éducation permanente. Mais produire une information critique de qualité a un coût. Soutenez-nous ! Abonnez-vous ! Et parlez-en autour de vous.
Profitez de notre offre découverte 19€ pour 3 mois (accès web aux contenus/archives en ligne + édition papier)